27 octobre 2004

actu des établissements

Delacroix (Drancy) : bilan de la journée de grève contre la précarité du jeudi 21 octobre

Taux de grévistes (chiffres de la direction) : autour de 40% toutes catégories confondues.
La cantine et le CDI étaient fermés, la loge et la repro en grève.
Des collègues TOS et quelques profs étaient là dès 8h30 pour commencer à organiser la journée et essayer de convaincre les hésitants de rejoindre le mouvement.
Vers 9h30 nous avons vu l’intendante pour avoir des informations plus détaillées sur les démarches entreprises à son niveau pour les CES-CEC du lycée.
L’AG de 10h30 en salle des profs n’en a pas été réellement une, il y avait urgence à faire un tas de choses avant d’aller au rectorat : ateliers de rédaction de lettres de motivation et CV de nos collègues CES ou CEC, visite des établissements proches (lycée Paul Le Rolland, clg Jorissen) pour informer les collègues, envois de faxs, etc.

Bref compte-rendu de l’audience au rectorat l’après-midi
Nous sommes arrivés à Créteil entre 14h et 14h30. Nous étions 42 collègues de l’établissement (profs, tos, CPE, surveillants). Nous avons demandé, dans un premier temps, à être tous reçus (noms des présents inscrits sur une fiche transmise par un appariteur).
Après pratiquement une heure d’attente, on nous a annoncé que seules 4 personnes pourraient être reçues par Mme Fleurot (chef de division de la DPAOS, division des personnels administratifs, ouvriers, santé et sociaux). Nous avons considéré cela inadmissible. Après discussion collective, nous avons opté pour proposer d’être reçus à 14 (les 5 CES ou CEC présents, 2 TOS dont le représentant FO, 2 profs SNES-FSU, 1 prof CGT , 1 prof SUD, 1 CPE, 1 surveillant, 1 assistant d ?éducation). Nouvelle attente, requête refusée. Nous sommes donc montés dans les bureaux à 4 (2 profs SNES, 1 prof CGT et 1 TOS FO) pour exiger de vive voix d’être accueillis en délégation plus large. Attente dans le couloir, il était 16h15 quand Mme Fleurot nous a enfin reçus. Elle était accompagnée de M.Lacheny (chef de service de la DPAOS 5, gestion des suppléances et des non-titulaires). Refus total de recevoir davantage de collègues. L’argument (bidon) du manque de locaux assez spacieux a été utilisé.
Voyant l’heure avancée, nous avons accepté de nous asseoir pour commencer la discussion. Mal engagée dès le départ : on nous a reproché de ne pas avoir pris de rendez-vous. Nous avons rappelé que ce n’était pas par eux que nous avions demandé à être reçus mais par le Recteur, qu’un fax avait été envoyé mardi 19/10 puis un courrier par la voie hiérarchique et que de toutes façons, même en votant une demande d’audience en CA au mois de mars pour aborder d’autres problèmes de fonctionnement du lycée, le recteur ne nous avait pas adressé de proposition de rendez-vous. Nous avons également rappelé que notre demande avait été appuyée par les secrétaires académique et départemental du SNES-FSU et que nous étions en grève à ce jour pour nous opposer au statut de futurs chômeurs des CES-CEC du lycée.
Mme Fleurot s’est dite surprise par cette grève. Elle a affirmé que rien n’était étonnant au fait que les CES-CEC arrivent en fin de contrat et que si ces personnels voulaient être titularisés ils n’avaient qu’à passer les concours, très faciles selon elle, pour les OEA. Nous nous sommes insurgés en rappelant les revendications de notre plate-forme (titularisation sans condition de concours ni de nationalité) et en lui disant que ses propos étaient indignants : certains de nos CES n’ont pas la nationalité française, l’accès aux concours leur est refusé ! Et de quoi vont-ils vivre à partir du mois de novembre ? Ce à quoi elle a répondu, en s’adressant aux enseignants : « comment avez-vous obtenu un emploi stable, vous ? En passant un concours ! ». Nous avons alors défendu l’idée que ces personnels employés pendant 2 à 5 ans dans des fonctions d ?agents, secrétaires ou surveillants ont largement fait leurs preuves ! Il est absurde de leur imposer une vérification de leurs compétences via un concours !
Nous avons ensuite voulu passer à l’étude des dossiers au cas par cas pour obtenir des réponses concrètes. Nous avons alors réitéré notre demande pour que nos collègues CES-CEC soient reçus en disant qu’ils étaient les mieux placés pour parler et que notre but n’était pas de nous substituer à eux. Il était pour nous scandaleux que ces personnels soient devant le rectorat avec leurs lettre de motivation et CV sans pouvoir être entendus. Mme Fleurot a alors accepté de les recevoir et est descendue les chercher.
Nous sommes passés dans un autre bureau plus grand. Nous étions donc 9 (les 4 premiers + les 5 CES-CEC qui avaient fait le déplacement). Mme Fleurot a soudain disparu sans dire au-revoir. Notre seul interlocuteur était donc M. Lacheny.
La discussion a été longue. Quelques moments de grande tension, notamment lorsque M.Lacheny a demandé aux 5 CES-CEC d’être « raisonnables ». Comment peut-on oser utiliser ce terme en s’adressant à des personnes qui n’auront bientôt pratiquement plus aucun revenu décent ?! Vives réactions aussi de notre part quand il a prétendu que nous étions surdotés en personnels au lycée Delacroix. Nous lui avons rappelé que les problèmes de fonctionnement au lycée sont nombreux à cause du manque criant de personnels : 2 CES agents de service qui ont obtenu le concours en juin dernier n’ont pas été remplacées (40h non pourvues donc par rapport à l’an dernier : ça fait plus d’un poste de titulaire !), les agents administratifs sont insuffisants car le secrétariat de la SEP fonctionne grâce à l’investissement d’un assistant d’éducation qui pendant ce temps là n’assure pas des fonctions de surveillance et la gestion des livres scolaires est chaotique de part la disparition de la fonction anciennement assurée par Georges Doz. De plus, les CPE et les documentalistes sont en nombre insuffisant. Il nous a répondu qu’il ne pouvait rien faire pour créer des postes (ah bon ? Oh, ben zut alors !).
Petit à petit, les profs intervenaient de moins en moins et les CES-CEC de plus en plus. Des moments mémorables : une CES s’est indignée quand M.Lacheny a prétendu que les contrats emploi-solidarité permettaient une réinsertion sociale. Quelle réinsertion ? Disait la collègue. « On nous donne du travail pendant deux ans puis on nous met à la rue ! ». Une autre CES a rappelé que l ?obtention de la nationalité française était sujette à un seuil de revenu stable, impossible à avoir avec ce type de contrats : « 45 ans en France et je ne peux pas l’avoir, votre nationalité ! ». Une autre collègue a refusé dans un premier temps de prendre le papier que lui tendait M.Lacheny dans lequel il avait écrit le numéro de téléphone d’une personne du rectorat à contacter pour solliciter un emploi. « ça répond jamais ce numéro ! » lui a-t-elle dit.
Il est impossible de retranscrire toute la discussion, tant elle a été longue et tendue. M.Lacheny nous a finalement certifié que les CES et CEC étaient prioritaires pour obtenir des postes de contractuels dans des établissements scolaires. Mais attention, il y a deux types de contractuels chez les personnels TOS : ceux qui pourvoient des postes de titulaires vacants, et ceux qui assurent des suppléances plus courtes (comme les vacataires chez les enseignants). M.Lacheny nous a signalé que les collègues sollicitant un emploi d’agent de service auraient plus de chances de l’obtenir rapidement que ceux qui sollicitent un emploi d’agent administratif. Il s’est engagé à être vigilant avec les dossiers de nos collègues et à avancer des propositions concrètes de réemploi le 5 novembre. Le 5/11, car c’est la date a laquelle il a accepté de nous recevoir à nouveau.
Nous avons quitté le rectorat à 17h45.

Au bilan :
 Le mouvement a été un peu couvert par la presse : article dans Le Parisien, brève dans l ?Humanité, dépêches AFP, info sur le site internet du café pédagogique.
 Nous avons bénéficié du soutien de plusieurs organisations syndicales et personnes :
 intervention du SNES-FSU de Créteil auprès du recteur pour appuyer notre demande d’audience et diffusion de l’info sur son site internet (www.creteil.snes.edu).
 mail de soutien et d’engagement d’intervention auprès du rectorat pour le suivi des dossiers, de la CGT Educ’action Créteil.
 mail de soutien et communiqué de presse de la CNT-FTE.
 mail de soutien du SNICS-FSU de Créteil (syndicat national des infirmières et conseillers de santé).
 mail de soutien et appel téléphonique des personnels du collège Anatole France de Pavillons sous Bois.
 mails personnels de soutien aux grévistes
 d’une ancienne surveillante du lycée qui a appris que nous étions en grève à travers le site internet du café pédagogique
 d’une ancienne CES qui travaille maintenant à la bibliothèque de l’institut de France.
 La réunion avec les parents d’élèves le soir ne s’est finalement pas tenue car nous sommes sortis très tard du rectorat et la route était encombrée. Un seul parent était venu au rendez-vous, il a été averti par téléphone.
 Pas de véritables garanties de réemploi de nos collègues, juste un engagement de prise en compte attentive des dossiers. Mais la mobilisation visible des personnels et l’exigence d’un nouveau rendez-vous avec M.Lacheny dès le retour des vacances (le vendredi 5 novembre) a montré notre détermination et notre refus de « lâcher l’affaire ».
 Des collègues fragilisés par leur statut de précaires ont été soutenus et appuyés, ce qui a permis de les rendre plus forts. Bien que nous soyons ressortis sans promesses fermes de réemplois, nous étions tous convaincus que le rapport de force avait bien été au rendez-vous et qu’il ne pouvait que favoriser les dossiers défendus. Pendant les discussions, l’évocation de temps à autres des dizaines de collègues qui nous attendaient à la grille du rectorat renforçaient nos propos. Les collègues CES-CEC n’auraient pas reçu le même accueil s’ils y étaient allés un par un sans le soutien d’un établissement engagé dans la grève. Que ce combat ponctuel nous serve d’expérience. La prochaine fois il faudra être encore plus nombreux !
 L’institution a une fois encore prouvé son cynisme. La lutte contre la précarité a encore de beaux jours devant elle !

Vendredi 22 octobre 2004
Une prise de parole a été faite en salle des profs à 10h30 pour présenter un compte-rendu de la journée précédente. Les CES-CEC ont remercié tous les grévistes de leur engagement à leurs côtés.
Une délégation a demandé au Proviseur de faire un courrier au rectorat indiquant que tous les personnels arrivant en fin de contrat ont donné entière satisfaction au lycée et qu’il appuyait la demande de réemploi défendue par les grévistes. Il a accepté et le courrier est parti le jour-même, adressé à Mme Fleurot et M. Lacheny.

Leticia FERNANDEZ (SNES-FSU)
23/10/04