Le grand bond en arrière
En 1970 le niveau de vie des retraité-e-s était de 30 % inférieur à celui de la population.
Le rattrapage s’est fait en une vingtaine d’années : en 1990 le niveau de vie des retraité-e-s rejoint celui des actifs-ves. Depuis 1993 nous assistons à un véritable renversement de tendance : les retraité-e-s sont devenu-e-s la cible des différentes réformes.
L’objectif affirmé est de réduire la part des retraites de 3 points de PIB, soit 66 milliards d’euros en 2020 et près de 100 milliards en 2060 !
Si les tendances actuelles se confirment, dans 30 ans on aura retrouvé le même niveau de vie qu’à la fin des années 60 où la pauvreté était massive chez les retraité-e-s !
Quels sont les moyens utilisés pour atteindre la cible ?
Les réformes
1993, 2003, 2010, toutes les réformes ont abouti aux mêmes résultats : travailler plus longtemps pour une retraite plus faible, la décote étant le mécanisme le plus efficace pour faire baisser les pensions.
La remise en cause des droits dérivés : droits pour enfants, réversion…
La non revalorisation des pensions
Avant 2003, les pensions étaient revalorisées selon l’évolution des rémunérations indiciaires des actifs qui reposait à la fois sur la revalorisation de la valeur du point d’indice de la fonction publique et sur les mesures statutaires ou catégorielles obtenues pour les catégories actives (exemple le PPCR).
Dans la fonction publique, la réforme de 2003 a porté un coup fatal à ce mécanisme d’indexation-péréquation puisque les pensions sont depuis indexées sur les prix.
Prenons un exemple : une année, les salaires augmentent en moyenne de 2,3 % et l’inflation est de 1 % ; les pensions perdent donc 1,3 % par rapport aux salaires (à la condition que l’inflation soit répercutée en entier sur les pensions, ce qui est rarement le cas !). Cela signifie que les retraité-e-s ne bénéficient pas des gains de productivité obtenus par le travail des actifs-ves.
Ce mécanisme est très efficace pour faire baisser le pouvoir d’achat des pensions : sur 30 ans cela représente une baisse de plus de 30 % !
La fiscalité
- CASA : 0,3 % sur les pensions depuis 2013 (souvent détournée de son objet qui est de financer la perte d’autonomie) ;
- CRDS : jusqu’à quand ?
- Plafonnement de l’avantage fiscal obtenu par la demi part pour les personnes seules, veuves ou divorcées ayant élevé des enfants ;
- Imposition des majorations familiales pour les retraité-e-s ayant eu 3 enfants ou plus (cette seule mesure rapporte au budget de l’état 1,2 milliard d’euros par an depuis 2014) ;
- Augmentation de la TVA de 19,6 à 20 % depuis 2014 ;
- Et bien sûr l’augmentation de la CSG depuis le 1er janvier 2018, plus 1,7 point soit 25 % d’augmentation.
Le coût de la vie
Les retraité-e-s sont les premières victimes de la politique d’austérité : désengagement de la Sécurité sociale entraînant une hausse significative des complémentaires (cf la MGEN qui prévoit d’augmenter encore les cotisations de 2 à 4 % l’an prochain s’ajoutant aux augmentations de cette année au motif que le « zéro » reste à charge pour les lunettes, les appareils dentaires ou acoustiques seraient pris en charge par les seules complémentaires).
Déclin des services publics, augmentation des tarifs de l’énergie, coût exorbitant de la perte d’autonomie, tout concourt à la baisse du pouvoir d’achat des pensions.
Un mot sur les projets gouvernementaux de financement de la perte d’autonomie : créer un cinquième risque pour la Sécurité sociale financé par des cotisations supplémentaires des salarié-e-s et retraité-e-s et instaurer une deuxième journée dite de solidarité telle le lundi de Pentecôte, ce qui impliquerait automatiquement le doublement de la CASA ( par mesure dite d’équité !).
Le président de la MGEN propose d’instaurer une assurance obligatoire perte d’autonomie.
Le SNES dans la FSU et le groupe des 9 demandent que la perte d’autonomie soit prise en charge à 100 % par la branche maladie existante !
Le « Big Bang » annoncé pour une réforme systémique du système de retraite
La réforme des retraites prévue par le président de la République ne touchera pas les pensions déjà liquidées : promis juré !
Comme les promesses n’engagent que ceux qui y croient, voyons ce qui s’est passé sur l’Arrco (retraites complémentaires du privé) !
Les actuels retraité-e-s sont touché-e-s par cet accord
L’accord décale de 7 mois la date de revalorisation des pensions. À compter de 2016, les pensions versées par l’Arrco et l’Agirc – puis, à partir de 2019, celles versées par le nouveau régime complémentaire unique – seront revalorisées au 1er novembre de chaque année au lieu du 1er avril. Principale conséquence de cette mesure : aucune revalorisation n’étant intervenue en 2014 et en 2015, la valeur de service du point restera fixée au même niveau que celui décidé en avril 2013 au moins jusqu’au 1er novembre 2016.
L’accord prévoit pour les 3 années à venir –2016, 2017 et 2018 – une revalorisation des pensions inférieure à l’inflation. Cela peut alors entraîner, pour les retraités, une perte de pouvoir d’achat. Leurs pensions seront indexées sur l’évolution des prix à la consommation hors tabac prévue pour l’année en cours, diminuée d’un point.
Mais si l’inflation est inférieure à 1 %, leur montant ne diminuera pas.
À partir de 2019, les pensions devraient être, à nouveau, indexées sur l’évolution du salaire annuel moyen (et non plus sur l’inflation, dont l’évolution est, en général, plus faible).
CONVERSION !
Dans le modèle de retraite par points pour tous il sera très simple de convertir nos pensions en points : par exemple une pension de 2 000 € serait convertie en 200 points d’une valeur de 10 € chacun.
Cela ne change rien la première année mais si la valeur du point baisse de 10 % et tombe à
9 € alors la pension chute et perd 200 € pour s’établir à 1 800 € au lieu de 2 000 € (CQFD)
Déclaration de Delevoye sur la réforme, je cite :
« Les droits acquis par les retraités le restent, mais tous les Français, retraités ou non, doivent se sentir concernés par l’évolution du système. Les retraités ne constituent pas un monde à part. »
Ce qui en clair signifie que les pensions déjà liquidées -les nôtres- peuvent varier à la baisse en fonction de l’espérance de vie et /ou de la situation économique comme cela s’est réalisé en Suède il y a quelques années.
Conclusion
Le choix politique qui refuse que le niveau de vie des retraité-e-s soit équivalent à celui des actifs-ves s’appuie sur une conception d’une société éclatée du tous contre tous dans laquelle les retraité-e-s seraient des « Privilégiés ».
C’est le choix d’une société inégalitaire dans laquelle les richesses produites par le plus grand nombre sont accaparées par les plus riches.
De cette société là, nous n’en voulons pas. C’est ce que nous avons dit le 22 mai et redirons dans la rue massivement le 14 Juin.
Jean-Bernard Shaki