Le passage des colle ?gues stagiaires a ? un temps plein a re ?duit comme peau de chagrin la formation initiale, laisse ?e a ? la responsabilite ? exclusive des corps d’inspection, et si la formation estampille ?e IUFM n’a jamais e ?te ? ide ?ale, la nouvelle formule rime avec de ?sorganisation et improvisation. Car le grand e ?cart est intenable : pour les formateurs, tre ?s majoritairement en exercice avant la re ?forme, il faut faire comme si rien n’avait change ?, alors qu’ils ont moins d’heures avec les stagiaires et que ceux-ci, dans le me ?me temps, ont une charge de travail de ?cuple ?e. Certes, la formation n’a pas e ?te ? supprime ?e : les colle ?gues qui de ?butent assistent, une journe ?e par semaine environ, a ? des sessions disciplinaires ou transversales, jusqu’a ? la fin du mois de mars. Mais la grave de ?gradation de leurs conditions de travail a des re ?percussions sur le contenu et le sens me ?me de cette formation. Le constat est inquie ?tant : selon les disciplines, et les groupes, les formateurs tentent de faire face au de ?sarroi des stagiaires et a ? un cahier des charges, re ?dige ? par les inspecteurs, impossible a ? traiter de fac ?on exhaustive.
Au de ?but de l’anne ?e, la formation disciplinaire s’est souvent limite ?e a ? « pre ?parer des roues de secours » et autres « kits
de survie » (anglais), des se ?quences toutes faites pour alle ?ger la charge de travail (lettres) et s’est trouve ?e incapable d’aller aussi vite que la musique : se ?ance sur « l’entre ?e en classe des e ?le ?ves » un mois apre ?s la rentre ?e ou « comment remplir ses bulletins » quand les premiers conseils de classe ont eu lieu. Si le travail sur la construction de se ?quences ou de se ?ances continue sans encombre au fil de la formation dans des groupes (physique chimie), c’est plus difficile dans d’autres ou ? le temps imparti aux « e ?tudes de cas » (aussi appele ?s « the ?rapies de groupe » par les stagiaires) finit par de ?border sur tout le reste (histoire-ge ?ographie). Face a ? des sessions qui semblent de ?connecte ?es de la re ?alite ? du terrain et des enjeux imme ?diats de leur pratique, notamment en formation transversale, de nombreux stagiaires finissent par voir dans la formation une contrainte qui contribue a ? aggraver leur fatigue, a ? les surcharger.
De l’avis des stagiaires, les IPR sont rarement pre ?sents lors des sessions : certains sont venus lors d’une formation transversale pour prendre la tempe ?rature et ont accepte ? de donner quelques indications sur leurs attentes concernant les crite ?res de titularisation : une grille de 10 compe ?tences sert de support a ? l’e ?valuation. Si des formateurs pre ?cisent que les compe ?tences 4 (Savoir construire et structurer un cours) et 5 (Savoir ge ?rer une tenue) seront primordiales lors des inspections, d’autres se contentent d’un discours ge ?ne ?ral, sans fixer de priorite ?s : en bref, il faudrait que les stagiaires soient capables de tout faire (bien) a ? l’issue d’une anne ?e ou ? rien ne leur aura e ?te ? e ?pargne ? ! Cela alors que, pour la premie ?re fois, les stagiaires n’auront eu droit qu’a ? une seule visite de formateurs dans leur cours pour les conseiller (au lieu de 2 auparavant).
Une partie de la formation retombe de fait sur le tuteur : de colle ?gue charge ? essentiellement du suivi et de l’accompagnement, il devient un « formateur » (le terme est employe ? dans un re ?cent rapport du ministe ?re et une formation pour les tuteurs, sur les me ?mes the ?matiques que celles prises en charge par les formateurs, a e ?te ? mise en place dans la pre ?cipitation), suppose ? pallier surtout par son exemple les carences des sessions de formation. Premier et souvent unique interlocuteur du stagiaire, il est aussi son e ?valuateur le plus courant. Mode ?le, formateur, juge... c’est beaucoup pour un seul homme ou une seule femme. Sans que cela soit la re ?gle, et sans pre ?juger des compe ?tences et de l’investissement de leurs tuteurs, les stagiaires ne vivent pas facilement cette situation. Telle tutrice parai ?t si aise ?ment maitriser sa pratique, que son stagiaire s’en de ?courage ; tel autre reste de ?sempare ? devant les difficulte ?s de son stagiaire a ? tenir ses e ?le ?ves...
Au final, le pie ?ge de la re ?forme de l’anne ?e de stage amoindrit, de ?structure et de ?voie la formation initiale, tout en la condamnant a ? bre ?ve e ?che ?ance. De l’aveu me ?me d’un IPR qui cherchait a ? rassurer un stagiaire, pour l’acquisition du me ?tier, « objectif 2014 ». Pour le SNES-FSU, impossible d’attendre : il est indispensable de revenir a ? une entre ?e progressive dans le me ?tier, avec une ve ?ritable anne ?e de stage re ?servant les 2/3 du temps de service a ? la formation.
Gre ?gory BEKHTARI