De quoi la « discipline positive » est-elle le nom ?

Si la réforme du collège, en convoquant davantage d’autonomie, avait déjà bien fragmenté le concept de « collège unique », la multiplication des expérimentations (écoles du socle, cours d’éloquence, cours de 45 minutes, « quart d’heure lecture » quotidien, cours le matin, EPS et pratique sportive l’après-midi,…), le label « cité éducative », les EPLEI et l’annonce d’un plan internats de différents types achèvent d’individualiser le fonctionnement de chaque collège sous prétexte d’adéquation avec leur public.

Dernière lubie technocratique teintée de scientisme des managers de l’éducation nationale : la « discipline positive », imposée sans concertation des équipes et sans aval du CA dans deux établissements classés REP+ en Seine-Saint-Denis, les collèges La Courtille (Saint-Denis) et Jean Lolive (Pantin). En apparence, il s’agit d’une approche « ferme et bienveillante » des pratiques parentales et professionnelles, issue d’une approche comportementaliste initiée aux USA par le best-seller de Jane Nelsen, une éducatrice inspirée par la psychologie adlérienne qui prétend agir directement, en situation, sur le comportement des individus, et singulièrement des enfants, par la motivation et la coopération : en réalité, un galimatias qui tente de définir scientifiquement, à coups de compétences, les normes d’une bonne discipline. On est plus proche du processus de développement personnel que de l’émancipation des individus !

En effet, derrière un fatras de propositions convenues qui fleurent bon son charlatan (on appréciera, entre autres, des compétences telles que «  le courage d’être imparfait » ou encore le « respect de soi et des autres » qui rappelle étrangement l’un des commandements ânonnés par Jean-Michel Blanquer : « Respecter autrui »), se dessine une vaste opération de contrôle des affects : les sciences de l’éducation, qui ont contribué à imaginer les fondements d’une école émancipatrice, sont reléguées aux oubliettes, avec tout ce qui relève de la psychologie sociale, des représentations culturelles, des facteurs sociétaux (alors même que ce sont 2 établissements classés REP+ qui sont les cibles de cette expérimentation !). Qu’importe ! Ainsi que le clament les thuriféraires de la « discipline positive », « un enfant réussit mieux lorsqu’il se sent mieux ! »

Par ailleurs, derrière ces fariboles se dissimule un outil de gestion managériale des adultes  : on éradique toute velléité critique, on fige, on naturalise toute forme de violence ou de colère. Il semblerait que « 4 jours de formation intensive » suffisent pour obtenir une « certification » en « discipline positive »… Le site de l’association (Discipline positive / Acteurs de lien) propose des kits, des « ateliers » et « formations », des ouvrages payants : il s’agit donc tout autant d’une offensive idéologique que de business à destination de parents et de professeur.e.s présenté.e.s comme démuni.e.s, en quête d’outils et de formation pour parfaire l’éducation de leurs enfants ou pallier la faillite supposée de l’école publique.

Ce projet « pilote », apparemment mis en place pour 3 ans, concerne un territoire donné, en l’occurrence, 2 communes du 93, dont la plupart des établissements sont classés en éducation prioritaire (lien avec les « cités éducatives » ?) et implique des « partenaires » divers : Ministère de l’éducation nationale, PMI,... Pour le moment, la « discipline positive » compte peu de « formateurs » dans le département mais la Seine-Saint-Denis est un champ d’expérimentation idéal pour un programme qui affiche une idéologie en tous points compatible avec les orientations technocratiques teintées de neurosciences du néo-libéral Blanquer. La vigilance est de mise, d’autant que la « discipline positive » continue de s’infiltrer en tapinois au coeur de l’institution, via les pressions institutionnelles, mais aussi via la formation continue désormais : cette année, une formation sera dispensée durant 3 jours dans un lycée du Val-de-Marne alors même que l’association Acteurs de lien, censée la dispenser, n’apparaît pas dans la liste des associations agréées par l’académie de Créteil !
Nb : oui vous avez bien lu !  : l’association Acteurs de lien, faux nez de la discipline positive en France, n’a ni l’agrément de l’académie de Créteil, ni celui du MEN, malgré une formation proposée cette année au PAF !

Notre intervention auprès du rectorat de Créteil reste pour l’instant sans réponse

Suite à notre article , M^me SCHELLINGER , responsable de deux stages cités, nous a demandé de préciser ici qu’elle ne travaillait pas pour l’association "Acteurs de lien / discipline positive ".

Nb : A ce jour, les stages sont toujours affichés au PAF de l’académie de Créteil.......