19 septembre 2024

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Déclaration FSU au CSA-A du 13 septembre 2024

Madame la Rectrice, mesdames et messieurs, membres du CSA académique

Intro générale : la période politique ouverte par les élections européennes du 9 juin 2024 ne cesse de s’étirer. La conséquence principale pour l’Education nationale est que nous avons fait une rentrée sans ministre après avoir changé 4 fois de ministres en 2 ans : c’est inédit !

En revanche, nous pouvons observer une continuité dans les politiques publiques éducatives : austérité et réformes néolibérales ayant pour conséquences une dégradation des conditions de travail, une standardisation de l’enseignement et une caporalisation des personnels.

La FSU n’est pas optimiste quant à la suite des événements, la nomination de M Barnier au poste de premier ministre sonne comme une trahison pour de nombreuses/x collègues. Alors que le NFP dont la FSU a soutenu le programme, est arrivé en tête des élections législatives anticipées, le PR a choisi de construire une alliance indigne avec le RN et de nommer un PM d’un parti dont le groupe parlementaire a 47 députés à L’AN : c’est un déni démocratique.

Nous pourrions donc reprendre l’argumentaire que nous avions développé ici sur les dangers du RN pour l’EN au mois de juin. En effet, le programme du RN pour l’éducation est effrayant à plus d’un titre : c’est l’école de l’exclusion, du tri et de la renonciation à la démocratie scolaire.
Pour les enseignantes, il s’agirait de transformer les professeures en simples exécutantes d’un enseignement défini par des politiques : ce sera donc une mise sous tutelle.
On n’est finalement pas très éloigné des dernières réformes mises en place dont celle du « choc des savoirs ». La porosité des idées des libéraux macronistes, des Républicains et du RN n’étonne plus du fait du soutien du parti de Marine Le Pen au gouvernement nouvellement nommé.

La FSU continuera son travail d’information des collègues et de toutes sur les dangers du RN et de l’extrême-droite pour les politiques éducatives et plus généralement sur les libertés publiques. Elle poursuivra, avec l’IS, sa dénonciation de ces politiques et sa lutte pour une société plus juste et émancipatrice pour les personnels, les élèves et leurs familles.

Sur la rentrée : les différentes enquêtes sorties sur la rentrée ne diffèrent guère par rapport aux années précédentes. Alors que vous annonciez, Madame la Rectrice, dans un article publié sur le site actu 77 à la fin du mois d’août que tous les postes de l’académie étaient pourvus, nous en sommes très loin dans la réalité. Dans le second degré l’enquête « flash » du SNES-FSU de rentrée dont les chiffres ont été arrêtés et publiés le 5 septembre permettent une fois de plus de démontrer que le compte n’y est pas et que, sans surprise, l’académie de Créteil est moins bien lotie que les autres. Alors qu’on estime qu’il manquerait au moins un professeur dans 56 % des établissements à l’échelle nationale, ce chiffre s’élève à 63 % dans notre académie et à 70 % dans les lycées du 93. Il manquerait également des AESH dans 17 % des établissements et des AED dans 15 %.

La crise de recrutement est donc très loin d’être enrayée comme l’indique le nombre de postes non pourvus aux concours : 3185 postes du second et du premier degré n’ont pas trouvé preneurs dont 1142 pour les concours du second degré soit 14 % des postes. Le recrutement des professeures non-titulaires, pourtant optimisé dans l’académie avec des contrats renouvelés dès le mois de juin ne suffit pas : une vraie politique de revalorisation salariale de nos métiers (nous réclamons une augmentation de 15 % du point d’indice) mais aussi d’amélioration des conditions de travail (en diminuant le nombre d’élèves par classe à 20 élèves par exemple) et de leur reconnaissance est plus que nécessaire et urgente. Rappelons ici qu’en 7 années de rentrée sous le président Macron, 8865 emplois de professeures ont été supprimés dans le secondaire pour 7441 élèves en plus, il faudrait créer 10617 emplois pour retrouver le taux d’encadrement de 2017. Cette enquête a aussi démontré l’échec de la mise en place des groupes de besoins profondément rejetés par les collègues du premier degré qui ont refusé en masse de trier leur élèves à la sortie de l’école élémentaire et ceux du second degré qui ont refusé les groupes de niveaux : seuls 36 % à l’échelle nationale des collèges et 10 % des collèges du 93 les ont réellement mis en place.

Nous nous interrogeons également sur la mise en place du dispositif de la « pause numérique », cette expérimentation semble avoir été présentée dans des collèges et des lycées de l’académie à la pré-rentrée. Si la question de l’exposition des enfants et des jeunes aux téléphones portables et aux écrans nous semble être un réel problème de santé publique, les mesures annoncées paraissent relever d’une entreprise de communication ministérielle et des collectivités territoriales sans que les équipes pédagogiques aient réellement été consultées. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Dans le 1er degré, les DSDEN semblent avoir entendu le désarroi des enseignant.es et la désorganisation des écoles que constituaient des fermetures de rentrée. En raison du calendrier contraint par la dissolution postélections européennes, les décisions de carte scolaire ont été reportées après la fin des classes. De ce fait, pour ne pas déstabiliser les équipes, aucune fermeture non préparée par une mesure conditionnelle n’a été opérée dans le 93 et le 94. Cela a permis une rentrée beaucoup moins chaotique de ce point de vue. Ce n’est pas le cas du côté de l’ouverture de dispositifs spécifiques pour la scolarisation des élèves en situation de handicap et plus largement du côté de l’ASH : nous semblons être au point de rupture sur le déploiement des dispositifs dans le contexte de crise du recrutement malheureusement très ancien sur notre Académie. En effet, énormément d’ULIS et UE sont couvert.es par des contractuel.les... quand ils sont couverts ! Comment assurer l’adaptation des enseignements pour ce public d’élèves à besoin particulier si l’on n’est pas enseignant.e ? Comment réfléchir aux inclusions dans les disciplines scolaires quand on ne connait pas les programmes des différents cycles, les attendus et les points d’appui nécessaires à l’apprentissage ? Si les DSDEN ont permis à de nombreux collègues de bénéficier de la formation CAPPEI cette année, force est de constater qu’il faut repenser les indemnités de fonction et améliorer grandement les conditions de travail pour que des collègues formés restent sur les postes. La question de l’accompagnement des équipes lors de l’ouverture des dispositifs doit être posée et harmonisée : il n’est pas tolérable qu’un dispositif ULIS ouvre sans coordo, sans AESH-co, sans AESH-i alors que 8 élèves sont notifiés en ce sens et qu’en 2 semaines l’équipe pédagogique n’ait pas eu un seul contact direct avec le service départemental de l’école inclusive comme c’est le cas à Arcueil !!! Cet accompagnement est essentiel, il en va de l’acculturation de nos collègues donc de notre école à l’école inclusive.

Alors qu’aucune mesure concrète d’amélioration des conditions de travail n’a été annoncée, l’élargissement à tous les niveaux des évaluations nationales renforce la mise au pas de la profession avec toujours plus d’injonctions aux « bonnes pratiques ». Ces évaluations standardisées ne permettent pas de répondre aux difficultés réelles des élèves, car elles ne renseignent pas l’enseignante sur les mécanismes qui font obstacle aux apprentissages. Par ailleurs, elles ont un effet de stigmate sur les élèves tout en réduisant leur évaluation à quelques indicateurs parcellaires voire hors sol qui ont en commun de ne pas échapper aux travers inquiétants du "teaching for test" qui a pourtant déjà fait des ravages dans d’autres systèmes scolaires.

De fait, ces évaluations participent à la dégradation des conditions de travail des personnels et à la construction d’une école encore plus inégalitaire.

La FSU-SNUipp appelle à la non passation de ces évaluations. Elle mène une campagne de conviction auprès des collègues, avec une consigne syndicale claire. Par ailleurs, aucun nouveau texte n’est paru depuis la rentrée 2023 au sujet des évaluations d’école. Nous en restons donc au fait que si vous ne dites pas qu’elles ne sont pas obligatoires, rien ne vous permet d’affirmer qu’elles le sont. Le vademecum auquel se réfèrent les IEN pour tenter de les imposer aux équipes est bien en-dehors du bloc règlementaire (comme tout vademecum). De plus en plus d’IEN comprennent néanmoins qu’il y a des priorités bien plus grandes sur le terrain que d’aller convaincre des équipes qui ne souhaiteraient pas entrer dans le dispositif. Il est temps que les cadres départementaux et académiques l’entendent aussi.

Au-delà des évaluations standardisées des élèves et des équipes enseignantes, la FSU continue de demander l’abrogation de l’ensemble des mesures du "choc des savoirs".

Concernant l’utilisation des outils type "ENT" dans le primaire, nous demandons que l’ensemble des outils compatibles avec le RGPD soient validés par l’académie et les départements. Nous ne comprendrions pas qu’une seule plate-forme soit autorisée alors même qu’elle serait payante ! Sauf à la création par vos services d’un outil compatible avec le RGPD et gratuit pour les écoles, nous nous opposons aux obligations d’utilisation de telle ou telle plate-forme comme aux conventions que vous pourriez passer avec un interlocuteur unique.

Enfin, concernant la rédaction du PPMS unifié, il est urgent que vous fassiez appliquer la circulaire du 8 juin 2023 : les enseignant.es en charge de la direction n’ont plus à charge la rédaction de ces PPMS. Ils sont sollicités "pour formuler [leurs] observations, y compris [leurs] propositions de modifications" dans un délai de 6 semaines après réception du document rédigé par la DSDEN du département concerné. Les convier à des "réunions de préparation" en leur envoyant des dossiers de plusieurs dizaines de pages à lire pour préparation voire leur demander la rédaction ne correspond en rien à la circulaire.

La rentrée a vu aussi fleurir plusieurs enquêtes sur l’enseignement privé qui vont toutes dans le même sens : un séparatisme assumé par l’État qui donne plus de moyens à des élèves triés socialement qu’aux enfants du 93, la véritable école du tri social est là, c’est un scandale.

Médiapart a révélé fin août que les régions avaient versé un total impressionnant de 1,2 Mds d’euros aux établissements privés de subventions supplémentaires entre 2016 et 2023 . La semaine de la rentrée, France info a démontré que dans une majorité d’académies les H/E des établissements privés étaient plus élevés que ceux des établissements publics. Enfin, mercredi dernier Libération a consacré une double page au financement par des fonds publics démesurés (plus de 3 millions d’euros)de la construction d’un établissement privé de notre académie dans le 77 : St Colomban à Serris soutenu par l’emblématique établissement Stanislas. Face à cela, un grand nombre de collèges, lycées et écoles ont des problèmes bâtimentaires, se demandent s’ils vont pouvoir se chauffer dignement et n’auront pas d’HSE cette année pour faire du soutien scolaire. Que dire du plan d’urgence du 93 en panne de réponse institutionnelle : que sont ces 358 millions d’euros comparé à cet argent donné pour, en très grande majorité, les enfants de la bourgeoisie qui refuse le jeu de la mixité sociale ? La colère ne peut que être grande contre un gouvernement passé qui a, en revanche, octroyé une augmentation des aides aux entreprises de 40,5 Mds (soit 2,7 % du PIB) en 2000 à 160 Mds aujourd’hui soit 6,4 % du PIB. En parallèle le budget de l’éducation est passé de 7,7 % du PIB en 1994 à 6,8 % du PIB en 2022, il faudrait une augmentation du budget de 23Mds d’euros pour revenir au budget de 1994. Il est impossible d’expliquer que l’argent manque, qu’il faut encore faire des économies, l’argent est là mais il est utilisé autrement que pour garantir une éducation de qualité aux enfants de ce pays et pour nos retraites qui ont été au coeur des dernières élections législatives.

La FSU poursuivra donc sa lutte pour défendre l’école publique lors de l’examen du budget y compris en appelant à la grève le 1 er octobre. Elle exigera une véritable revalorisation des personnels par une augmentation conséquente des salaires, l’abrogation de la réforme des retraites et la revalorisation des pensions, le retrait du choc des savoirs, la remise à plat de l’organisation des lycées et du bac Blanquer et la suppression de Parcoursup. Elle construira, avec les personnels, le plan d’action permettant d’obtenir satisfaction de ces revendications.

Paragraphe sur le fonctionnement de la FS A

Pour terminer, nous souhaitons vous alerter ici, Madame la Recrtice sur le fonctionnement de la FSA et l’état de la prévention dans l’Académie : suite à une clarification nécessaire lors de la FSA du mois de juin 2023, notamment sur la question de l’amiante, force est de constater que les réponses du Rectorat divergent selon nos interlocuteurs. Cela nous semble inquiétant : au-delà de la cacophonie qui ne permet pas de lire clairement le message qui doit être celui de l’Institution, il est très étonnant (c’est un doux euphémisme) que des positions individuelles qui contreviennent aux textes règlementaires voire à la Loi puissent être ainsi diffusées. Pour ne pas empiéter sur le sujet de ce CSA A de rentrée, nous avons choisi de vous remettre une lettre qui reprend les étapes de ce malaise de fonctionnement du dialogue social au sein de la FSA que nous souhaiterions dépasser rapidement.